PLF 2019 Mission(16-22 justice) : Mon intervention en tant que porte-parole du groupe Les Républicains

Mercredi 31 octobre 2018

Intervention de M. le Député Jean-Louis MASSON
Porte-parole du groupe Les Républicains
PLF 2019 Mission 16-22 justice

Madame la Ministre,

Il y a deux ans, le garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas parlait de « clochardisation » de la justice française.

Le rapport de la Commission Européenne pour l’Efficacité de la justice (CEPEJ) publié il y a quelques semaines vient malheureusement de confirmer ce diagnostic.

La France consacre moins de 66 euros par habitant pour sa Justice. C’est beaucoup moins que dans des pays équivalents, l’Allemagne par exemple qui y consacre 3 fois plus avec 122 euros par habitant.

Nous prenons acte que ce budget augmente de près de 4,5 % pour atteindre 7,291 milliards d’euros en crédits de paiement. Cela va dans le bon sens mais demeure insuffisant.

Certes et en volume, votre projet d’augmentation de cette mission régalienne se chiffre à 300 millions pour 2019. Si on y ajoute les 260 de l’année dernière, cela fera 560 millions sur 2 exercices budgétaires.

Cela étant, je vous propose de mettre cette somme en perspective avec un autre chiffre, celui de la dépense publique. Sur les 2 mêmes exercices, elle va s’accroître de 42 milliards.

Si vous faites une règle de 3, vous observerez comme moi que l’augmentation du budget de la justice ne représente que 0,013% de l’augmentation de la dépense publique sur la même période.

Non, madame la ministre, sans vouloir vous offenser, votre budget ne comble pas le retard accumulé et, partant, l’immense retard de cette fonction essentielle.

Comme vous le savez, votre budget ne permettra pas de décoller de la toute fin du peloton européen en la matière. Peu glorieux pour la patrie des droits de l’homme.

Mais tout cela, le Sénat vous l’a dit lors notamment de l’examen du projet de loi de programmation 2018-2022.

2/ QUELQUES OBSERVATIONS :

2.1/ Justice judiciaire :

Nous devons cette année encore déplorer la pénurie chronique des magistrats et fonctionnaires de greffe. Cette situation se traduit d’ailleurs par un délai moyen de traitement des procédures qui augmentent, toutes juridictions confondues. Nous vous faisons grâce des chiffres, vous les connaissez mieux que nous.

On note toutefois une augmentation importante des crédits pour le recrutement de magistrats à titre temporaire ou les agents non titulaires.

Cette mesure s’inscrit de toute évidence dans cette volonté gouvernementale de recourir plus largement à des contractuels dans la fonction publique pour faire des économies ; nous vous le disons solennellement, Madame la Ministre, nous sommes formellement opposés à ce que cette règle s’applique à la Justice.

2.2/ Administration pénitentiaire :

Nous notons un recul important des annonces présidentielles sur la lutte contre la surpopulation carcérale au sein des maisons d’arrêt.

15000 places nouvelles devaient être crées d’ici 2022. Vous révisez ce chiffre à 7000. Au demeurant et compte tenu des délais de réalisation d’un établissement pénitentiaire, de l’ordre de 4 à 5 ans, votre nouvel objectif est totalement irréalisable.

Vous n’avez pas, d’ailleurs, à ce jour, défini un programme définitif d’implantations de nouveaux établissements.

Les maisons d’arrêt resteront donc surpeuplées. Qu’il me soit permis de revenir un an en arrière sur ce sujet. Vous étiez alors portée par le même enthousiasme affiché et l’on constate aujourd’hui que rien n’a changé sur ce point.

Pas étonnant qu’il existe une véritable crise de recrutement au sein des agents des services pénitentiaires eu égard évidemment à leurs très mauvaises conditions de travail.

2.3/ Délinquance des mineurs :

Les évènements récents ont hélas apporté une nouvelle illustration de la nécessité de faire du traitement de la délinquance des mineurs une priorité.

Pourtant, le budget que vous présentez ne reflète absolument pas cette priorité. Les crédits accordés à la protection judiciaire de la jeunesse connaissent des hausses bien dérisoires au regard des enjeux.

L’évolution de la délinquance des mineurs exige des moyens beaucoup plus importants.

Il convient en particulier de tirer toutes les conséquences du rapport de l’inspection générale des services judiciaires et de l’inspection générale des affaires sociales sur le dispositif des centres éducatifs fermés de juillet 2015, et de repenser en profondeur leur fonctionnement.

2.4/ Aide juridictionnelle :

Nous constatons année après année, que le budget de l’aide juridictionnelle ne fait qu’augmenter sans qu’aucune réponse ne soit jamais apporté pour améliorer son accès et son fonctionnement.

Au final, ce budget affiche certes une priorité accordée à la justice mais nous le jugeons insuffisant au regard des besoins qui sont considérables. Aussi, nous sommes enclins à voter contre ce budget mais nous nous déterminerons définitivement après les débats.

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