M.le député, jean-louis MASSON critique le projet de loi « asile – immigration »

Mon discours :

Merci Madame la Présidente, M. le Ministre d’Etat, Mesdames les Présidentes de commission, Mme la rapporteur, mes chers collègues, J’aurais aimé monter à cette tribune pour dénoncer une loi d’affichage !
J’aurais dit que sa portée serait au mieux symbolique puisqu’elle succède à une loi de 2015 impossible à évaluer du fait de son application récente, qu’elle précède de peu le projet de réforme de l’asile européen commun qui est en cours d’élaboration et devrait déboucher sur l’adoption des textes directement applicables en France.  J’aurais placé mon propos sous le haut patronage de Montesquieu pour lequel « Les lois inutiles affaiblissent les lois essentielles ».  J’aurais dégainé mes punchlines en disant que votre définition du changement c’est la révolution à 360 degrés : c’est-à-dire marcher sans avancer. J’aurais facilement mis en évidence que cette loi, à l’image de quelques autres vendues à grand renfort de communication sur le changement, n’est qu’un chapelet d’ajustements technocratiques que symbolise le débat autour des délais (15 jours par ci, un mois par-là) alors que potentiellement la procédure s’étirera encore sur des années : saisine OFPRA, CNDA, arrêté préfectoral d’expulsion, recours au TA puis devant la cour administrative d’appel, puis nouvelle saisine de l’OFPRA pour un nouveau motif !

         Bref, un projet de loi timide mis en scène comme une démonstration de force. Nous aurions glosé sur l’étendard médiatique que représente le dispositif sur l’excision, pratique barbare que nous condamnons tous. Dispositif faussement généreux tant il est irréaliste : trente millions de femmes seront victimes de mutilations sexuelles d’ici 2023, selon l’ONU. Pouvons-nous sérieusement l’assumer ?…   

Mes chers collègues, la France, ne doit pas choisir les causes à défendre parmi les atteintes aux droits de l’homme. Elle doit les condamner toutes. Dans l’ensemble des pays qui appliquent la charia, la lapidation est une peine et des mutilations sont possibles. Or, rien de spécifique n’est mentionné à ce sujet dans le texte soumis à notre examen. Pourtant, je rappelle que la Cour européenne des droits de l’homme, dans un arrêt de 2001, fait observer l’incompatibilité du régime démocratique avec les règles de la charia.

 J’aurais aimé m’en tenir à cela, je vous l’assure.
 Personne dans les rangs de la droite républicaine ne remet en cause le droit d’asile. Pour autant qu’il s’agisse d’un asile justifié et encadré.    

Reste, l’immigration. Un des plus grands enjeux politiques de notre temps.
Le projet de loi n’inversera pas la tendance et ne constituera en rien un outil efficace face aux défis qui s’avancent. C’est un texte timide. En vérité, l’immigration incontrôlée continuera de plus belle.

La réalité, comme l’ont développée mes collègues Guillaume Larrivé et Eric Ciotti, c’est que cette loi a écarté d’emblée tous les sujets de fond susceptibles d’opérer un vrai changement. Que l’on soit d’accord ou pas, la résolution des défis à venir passera par une décision sur le droit du sol, l’instauration de quotas, une répression accrue, la transformation de l’OFPRA et du CNDA en véritables juridictions, une action géopolitique et diplomatique plus consistantes.

Les migrations sont un des plus grands enjeux de notre temps : étouffés par les tabous, c’est pourtant le plus mal pensé : Le droit du sol n’est pas débattu, nous préférerons un bricolage à Mayotte, la possibilité d’établir des quotas écartée d’emblée, le durcissement des sanctions oublié puisque n’est même pas rétabli le délit de séjour irrégulier abrogé en 2012.

La réalité, c’est que loin d’améliorer la situation, ce projet de loi va l’aggraver. Administrations préfectorales, juges et policiers, tous les acteurs de terrains, le redoutent et s’en alarment à juste titre.  Aux dires du Conseil d’Etat, au lieu de simplifier le droit d’asile, elle va le complexifier. Or, compliquer le droit, c’est compliquer la gestion des délais et des urgences.   Enfin, rien ne permet d’affirmer à ce jour que l’administration sera en mesure de réaliser les éloignements.

  Autre erreur majeure, votre projet d’un regroupement à l’initiative de l’enfant est un dévoiement juridique qui change la nature du regroupement familial. Ce dernier suppose des capacités d’accueil de la famille de la part des demandeurs qui doivent prouver leur intégration (stabilité, ressources, etc). Les mineurs ne peuvent représenter ce socle indispensable à l’intégration. Ils seront livrés soient à la dépendance sociale soit aux organisations criminelles. La réalité, c’est que déjà aujourd’hui, police et justice font face à des Mineurs faussement isolés et des nouvelles filières de « faux mineurs » dont la preuve de l’isolement et de la minorité incombe aux services de police. Monsieur le ministre de l’intérieur, la réalité, c’est que la mairie de Paris vous appelle au secours face à la violence de groupes de mineurs livrés à eux-mêmes au nord de la capitale. Voulez-vous vraiment faire venir leur fratrie et inciter des filières à s’organiser ?

Voilà la réalité ! Ce n’est pas le réalisme, accusé d’être une surenchère, qui nourrit le populisme, monsieur le ministre d’état comme vous l’avez exprimer lors de votre discours liminaire, mais c’est la démagogie et l’inefficacité.

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